Sentinelle d'un monde à créer! La question. Peut on faire du beau avec du laid r s n'est pas qu'un pensum de philosophie presque galvaudé par trop de théories et un certain nombre d'années réflexives qui sans l'épuiser, l'auront au moins usé jusqu'à l'élimer. Une question de ce monde, vieilli et désespérément désenchanté Une question à laquelle ce monde, notre monde n'a su apporter qu'un bavardage fat et satisfait de penser au lieu de concrètement essayer de réparer, solutionner, ou comger. Recréer pour se recréer. A ce brouhaha d'idées, de débats sans cesse contredits mais figés dans une immobilité confortablement installée, l'artiste Morne Abdelali oppose le silence et la matérialisation littéralement palpable d'une société possible qui saurait affronter et remédier à cette dialectique opposant deux états du monde sans chercher à les réconcilier. Car oui, Morne Abdelali s'applique quotidiennement à transfigurer dans son atelier la laideur diffuse qui s'est installée dans nos sociétés en espoir et harmonie. Oui, dans son atelier, tous les jours l'artiste comme une chercheuse d'or et d'alchimie créé à partir du vulgaire voire du sordide de la beauté, sans pierre philosophale mais avec de la terre, des couleurs et du papier, elle opère la transmutation de nos complaisances, nos compromissions ou encore celle de notre lâche passivité en des possibles Menchantés Elle repeuple notre monde aussi fatigué que ses hommes et femmes devenus insensibles et blasés, d'une nouvelle humanité. Décolonisée, évidemment, mais dans un sens élargi à toutes les complexités de nos Msignements et de notre intolérable tolérance à tout tolérer. Accepter. Toutes nos addictions, nos accommodations et autres petits arrangements. Avec soi-même, les autres et ce monde qu l'on a cru construire et que nous subissons depuis qu'il nous a, comme un Frankenstein contemporain, totalement échappé. Patiemment et dans une sorte de clandestinité, Morne Abdelali, dans le silence de son atelier que ne perturbe aucune des créatures qu'elle a portées autant que façonnées, place dans notre monde gris et fatigué, une armée de sentinelles aussi gaies que pacifiques mais déterminées. Face à notre silence ou à notre brouhaha inaudible et confus, ces personnages hauts en couleurs, libres et décomplexés semblent alors plus éloquents, expressifs et convaincants que nos bavardages stériles et figés. Ils sont porteurs d'une vie, la vraie, que nous avions laissé peu à peu nous quitter. Ces sentinelles, armées de bienveillance et de bonté. Ces petits soldats de la tolérance et de l'espoir-retrouvés s'opposent calmement, tranquillement, sans bruit mais avec fermeté à toutes les formes d'obscuration de nos habitudes et des sociétés qu'elles ont créées. Celle-ci, affirme le droit des femmes à circuler sans être les victimes habituelles du machisme et de toutes les autres formes de misogynie et de violence qu'elles finissent toujours par engendrer. Telle autre a réussit à s'envoler dans la première navette africaine, très loin, sans apesanteur vers les étoiles de nouvelles galaxies. Car chez Morne Abdelali, par cette dissémination et son espoir d'une contagion par les utopies tranquillement défendues par cette armée de sentinelles d'un monde à retrouver voire à créer, se diffusent, s'installent nos indépendances que cette nouvelle humanité est en train d'imposer C'est bientôt. Presque demain. Presque à portée de main Sans haine, sans arme, et sans violence. Avec seulement la liberté conquise et assumée, les sentinelles de Morne Abdelali travaillent avec courage et entêtement en usant pour seuls outils, de patience et de beauté qui transmueront définitivement définitivement et dès 2034 notre monde en un havre enfin vivable, gracieux et dénué de toutes ses laideurs et des ses douloureuses blessures. C'est un monde possible celui des artistes, des poètes mais aussi de tous ceux qui un jour l'ont espéré ou rêvé Celui où tout n'est qu'ordre et beauté, luxe, calme et volupté... Syham Weigant, mars 2019